Notre dernière histoire ensemble
Ces mots sont difficiles, étranges et pleins de souvenirs.
Guidoune est décédée.
Changement de comportement du tout au tout en quelques jours, je me suis rendue à la clinique. J’y ai exposé la liste; perte d’intérêt pour ses jouets préférés, perte d’appétit, soif insatiable, perte de poids marquée, sentiment de fatigue et énergie très basse, rythme cardiaque anormalement élevé au repos, toux et muqueuse très pâle. Guidoune n’allait vraiment pas bien.
Une prise de sang plus tard, j’apprenais qu’elle souffrait d’anémie très sévère. Quelques tests suffisent pour me confirmer que c’est suite à une hémorragie interne. Nous ne pousserons pas nos recherches puisque dans son état, il n’y avait pas de point de retour. Savoir si c’était sa moelle osseuse ou un cancer n’aurait rien changé ici. C’était irréparable pour un chien de 12 ans. Lui faire subir des chirurgies importantes pour allonger sa vie de quelques semaines, quelques mois peut-être ; et surtout, dans quel état serait-elle pour ces derniers moments ? Je préférais prendre 24h avec elle pour lui dire que je l’aime, et combien elle allait me manquer. Pour ensuite, par amour, la laisser partir sans plus de souffrance.
Je suis donc retournée à la maison avec le cœur gros. Je savais que le lendemain serait notre dernière journée. J’ai passé la journée à lui gratter les oreilles, à la nourrir de cretons aux anti-douleurs et à lui dire à quel point j’étais heureuse de nos 4 dernières années ensemble.
La maladie progressait tellement vite que quelques heures après, Guidoune n’était même plus en mesure de se tenir debout. Fidèle à elle-même, comme la princesse indépendante qu’elle est, elle est sortie faire son dernier pipi, tant bien que mal, ne voulant l’aide de personne. Il m’a fallu la convaincre de se recoucher dans le gazon devant la maison et prendre un moment pour lui expliquer que c’était assez. J’imagine que ça me faisait du bien à moi de rationaliser.
On l’a ensuite emmenée à l’urgence où elle a été prise en charge rapidement. La voir partir sur une civière, le regard à ma recherche, a été la chose la plus difficile à voir. Par chance, j’allais seulement stationner l’auto. Ce sont ses yeux étincelants quand elle a entendu ma voix en roulant vers moi pour son dernier voyage qui m’ont confirmé qu’on s’aimait toujours et encore plus.
Couchées en se regardant, on se tenait la patte comme durant toutes nos soirées cinéma à la maison. Elle est partie vite, mais bien. Le personnel de l’urgence vétérinaire a été doux. Je pourrais même dire que pour une fois, porter un masque a été positif, car on ne voyait pas mes larmes, ma grosse morve et toute ma peine.
Sur le chemin du retour, j’ai eu le réflexe de vérifier que tout est beau sur le banc arrière, là où elle se couchait toujours. Cette fois-ci, c’était un sac inerte. J’ai pris la décision de l’enterrer dans un endroit qui l’autorise. Elle sera à l’ombre, sous un arbre qu’elle connaît bien. Elle pourra faire de la gestion de vers de terre et jouer au frisbee avec ses nouveaux amis de l’au-delà.
Elle laisse en deuil tous ses copains, mais certainement Watson et Roxy, ses meilleurs amis. Elle manquera à toute l’équipe de "On va se promener", qui l’ont rencontrée de près ou de loin ; toutes les personnes qu’on a croisées sur notre chemin des 860 lieux visités ensemble au cours des 4 dernières années. On aura vécu des aventures, des découvertes et elle aura pu sniffer aux 4 coins de la province.
Aujourd’hui, c’est le cœur lourd que je me réveille pour la première fois sans demander à mon chien s’il a bien dormi, car je sais qu’elle est bien dans son petit nid. Je ne demanderai à personne si c’est l’heure qu’on se lève ; je ne sortirai pas en bobette à la vue de mes voisins pour lui permettre de faire son premier pipi, même avant le mien. Je ne prendrai pas mon café avec une odeur de croquettes et mes vêtements noirs le resteront. L’ambiance est étrangement calme ici. Je cherche constamment sa présence à mes côtés, par réflexe. Je regarde son coussin vide, je dors avec sa doudou.
La maladie l’a emportée certes, mais je préfère célébrer toutes les montagnes qu’on a visitées quand elle était plus en santé. Cette semaine, c’est seule que je vivrai mes aventures. Il faut faire confiance au processus de deuil, au temps. Mais osti qu’on était bien la semaine passée en vacances sur la plage à se regarder dans les yeux.